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22 octobre 2019 2 22 /10 /octobre /2019 12:03
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18 juillet 2019 4 18 /07 /juillet /2019 11:35
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16 juillet 2019 2 16 /07 /juillet /2019 11:42
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6 décembre 2018 4 06 /12 /décembre /2018 09:44

Ce n'est pas le principe de la démocratie représentative dans la 5ème République qui est fini, mais l'interprétation qu'en font tous nos présidents depuis Georges Pompidou. Disons que De Gaulle est le seul à avoir respecté l'esprit de notre monarchie républicaine : le monarque n'est légitime qu'à la condition de rallier la majorité absolue des suffrages populaires inscrits et non-inscrits. Le seul fait d'avoir dû lutter contre François Mitterrand au second tour de la première élection au suffrage universel de 1965, avait plongé De Gaulle dans un doute profond sur sa capacité à représenter le peuple français. La seule défaite au référendum de 1969 avait suffi à le faire démissionner alors que son gouvernement avait une majorité royale au Parlement.

Le Président garant de la Loi par les comptes

Le fondement constitutionnel de la 5ème République est la bicéphalie du pouvoir exécutif. Le Premier Ministre et son gouvernement soutenus par la majorité des députés gouvernent. Le Président ne gouverne pas : il préside le Conseil des Ministres et veille à la continuité des institutions démocratiques de l’État. Stricto sensu, le président ne fait pas de politique : son rôle est de choisir, de nommer et de surveiller les principales personnalités politiques qui gouvernent, légifèrent et jugent. Le président incarne l'unité du corps politique français entre le peuple et les élites, lesquelles sont fonctionnellement au service du peuple et de la solidarité nationale par la logique-même du régime républicain.

L'esprit de la 5ème République a été respecté par la force des choses lors des cohabitations où le Président a dû nommer un premier ministre n'entrant pas dans sa vision politique personnelle à cause d'une majorité parlementaire opposée à ses vues. Les cohabitations sous Mitterrand puis Chirac ont bien montré que le pouvoir du Président ne porte que sur le choix des personnes et sur la surveillance de leur honnêteté constitutionnelle et politique. C'est précisément cette fonction présidentielle de surveillance de la probité du personnel politique qui a été abolie de fait par le passage du septennat au quinquennat et par la réduction de l'élection législative à un troisième tour idéologique et technique de l'élection présidentielle.

L'élection d'Emmanuel Macron a été de fait la mise en liquidation constitutionnelle de la 5ème République dévoyée en démocrature. Après la disparition sous le second mandat de Chirac du Premier Ministre comme véritable responsable exécutif de la politique gouvernementale, l'instauration de la présidence jupitérienne en 2017 a été la seule manière de palier la dissolution d'une légitimité gouvernementale qui n'existe que par subordination à des débats parlementaires transparents et à un pouvoir législatif réellement autonome face au pouvoir exécutif. Non seulement Macron applique un programme politique à la place du Premier Ministre mais le Parlement élu comme le Président, par une fraction tout à fait minoritaire du corps national n'a aucune légitimité pour discuter ou contredire ce que décide le Président.

Les comptes monétaires et les comptes électoraux

La République demeure par une légalité constitutionnelle mais les représentants exécutifs, législatifs et judiciaires du peuple souverain ont perdu leur légitimité politique. Depuis la faillite financière et monétaire de 2008, ils ont également perdu leur crédibilité morale et leur liquidité financière. Les citoyens constatent que la politique gouvernementale est contraire à la conception majoritaire de leurs droits et de leurs intérêts économiques. L’État comme personne morale acteur et dépositaire des intérêts et de la cohésion de tous les citoyens n'est plus qu'un syndic de faillite de l'état-nation dont il faut extraire la "start-up nation". Personne n'a plus d'oreilles pour écouter les gilets jaunes sauf le Président qui est devenu la seule personne physique incarnant la réalité efficiente du pouvoir. Les élites entendent et même anticipent la révolution mais il n'existe plus de corps intermédiaires pour établir une cohérence réelle entre les attentes du peuple et les actes de décision politique gouvernementale.

Une autre transformation a vidé le pouvoir politique de sa substance depuis 1983 en France : la libre circulation monétaire du capital adopté par les gouvernements libéraux du Président Mitterrand et de ses successeurs. Les élites françaises ont mis à profit l'échec de la politique socialiste de relance budgétaire de l'économie pour achever l'intégration du marché français dans la globalisation libérale. Pour ne pas avoir à payer par la dévaluation du franc les échecs possibles de la politique économique nationale, le choix a été imposé au peuple français de ne plus financer les dépenses publiques par la seule ressource fiscale nationale mais aussi par la dérégulation financière. La dénationalisation des monnaies permettait un recours à l'endettement étranger sous le seul contrôle des intérêts financiers privés hors de la loi des États et de la souveraineté nationale.

Depuis 1983, les gouvernements français sont libres de promettre n'importe quoi au peuple français sans jamais parler du règlement à terme du prix de leurs programmes. Non seulement les gouvernements français ont pu librement acheté leurs électeurs avec l'augmentation des emprunts à l'étranger qui ne paie pas d'impôts en France ; mais ils sont entrés dans la zone euro qui interdisait de dévaluer les dettes françaises proportionnellement à la probabilité de leur remboursement par les excédents de la balance commerciale des biens et services. Depuis 1983, les Français ont été mis au chômage par l'impossibilité de dévaluer le prix du travail français en fonction des déficits de croissance et de compétitivité du marché français par rapport à ses concurrents internationaux.

L'argent qui compte hors de la Loi

Depuis la dérégulation libérale des années 80, c'est à dire depuis la déconnexion totale entre la politique monétaire française et l'équilibre de ses finances publiques, les Français les plus riches peuvent sans limite ni contrôle public exporter leurs revenus hors de la souveraineté nationale qui les fait travailler. Afin de ne pas payer les impôts et contributions sociales qui font réellement la rentabilité du capital, le capital est financièrement déclaré à l'extérieur de la juridiction domestique. Au-delà d'un certain niveau d'accumulation et de concentration du capital entre les mains oligarchiques, toute la plus-value est délocalisée sans le moindre coût social et réglementaire afin d'être reprêté au gouvernement français sous forme de dette extérieure de l’État français.

Cette irresponsabilité financièrement et fiscalement institutionnalisée de l’État national a dévasté la démocratie représentative. D'une part la fiscalité n'a plus reposé que sur les moins riches et les activités économiques domestiques non délocalisables ; d'autre part l'explosion de la dette publique extérieure et intérieure a rendu le service de la dette extravagant dans les budgets publics. Les bases fiscales domestiques se sont rétrécies par la délocalisation massive du capital industriel ; mais infiniment plus grave : les représentants de la nation sont devenus les représentants des intérêts des créanciers étrangers et des émigrés fiscaux par la force financière des choses comptables.

De fait le Président Macron n'a pas été élu par les citoyens français mais par l'oligarchie financière globalisée. Emmanuel Macron a financé sa campagne avec des fonds absolument invisibles au citoyen, au législateur et au juge français et sa feuille de route politique est impérative : alourdir la fiscalité domestique et réduire les dépenses sociales et investissements publics afin de freiner la croissance comptable de la dette extérieure. En termes techniques : stabiliser la dette publique à 100% du PIB par la taxation de la consommation et la réduction des investissements publics. Si le Président Macron ne remplit pas les objectifs qu'il a vendu aux créanciers de la France représentés par le Système Européen des Banques Centrales et la Commission Européenne, les banques françaises et a fortiori les banques étrangères accroitrons l'évasion fiscale des Français riches afin d'interdire sa réélection voir de le forcer à démissionner.

La monnaie reliée au bien commun par le corps d'un président

Mais la perversité du système libéral de liquidité absolue du capital par dessus la Loi des États peut dans le cas particulier de la 5ème République française déboucher sur une révolution... financière. Au delà de son pouvoir de travailler les rapport de force politique par la révocation des ministres ou la dissolution de l'Assemblée Nationale, le Président Français est un chef d'état constitutionnellement puissant. Garant de l'unité de la nation et de l'ordre républicain, le Président peut par l'article 16 instaurer une dictature provisoire pour restaurer un État de droit menacé par la rue et ou par la fuite des capitaux. La révolte des gilets jaunes a un impact capitalistique international considérable. Si l’État français vacille, les banques françaises maintenues à flot par la garantie sans condition des finances publiques françaises peuvent faire faillite en quelques secondes.

Si les banques françaises font faillite, le marché mondial de la liquidité des banques centrales se gèle instantanément. Le sauvetage coordonné entre banquiers centraux qui avait renfloué les marchés financiers après la faillite de Lehman n'est plus crédible à cause de l'énormité avérée de la dette publique mondiale. Il n'y a donc que le rétablissement des frontières monétaires et la taxation des flux financiers qui permettent de sauver la liquidité du système bancaire mondial.

L'incarnation et le pouvoir du chef de l’État français font de la France la seule puissance planétaire où le démantèlement financier de la démocratie peut se retourner par la dictature du peuple physiquement et nommément représenté par le président. Comme l'armée et la police font partie du peuple depuis 1848, le chef de l’État ne peut sauver l'épargne et le capital des riches qu'en rétablissant la solvabilité de L’État par la taxation de la liquidité monétaire entrante du capital aux frontières de la souveraineté nationale.

En 1958, le Général de Gaulle a sauvé la République en redéfinissant les frontières de la souveraineté nationale à l'intérieur de laquelle se déployait la véritable responsabilité politique, sociale, juridique et financière du peuple et des élites solidaires d'un même État de droit. La condition sine qua non de la démocratie représentative est la responsabilité personnelle physique et patrimoniale de tout emprunteur de capital politique ou économique. Le libéralisme économique qui détache la plus-value du vrai travail est cliniquement mort avec les gilets jaunes.

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28 octobre 2018 7 28 /10 /octobre /2018 17:12

Commentaire de « Le scénario italien commence à prendre tournure » publié par François Leclerc.

l’Italie sera le lieu de la dislocation de l’euro en tant que monnaie unique gérée par la BCE nominalement indépendante des politiques budgétaires et fiscales des États membres. L’Italie ne peut pas sortir de l’euro qui est la seule unité de compte utile et efficace à mesurer et financer l’endettement public en même temps par rapport à l’économie réelle de la société nationale italienne et par rapport à l’économie réelle européenne. Au cœur de la civilisation européenne, l’Italie est totalement intégrée industriellement, financièrement, juridiquement et culturellement à l'espace politique européen. L’État italien ne peut pas cesser d’exister, de fonctionner et de dépenser sous prétexte qu’il est interdit à la BCE de financer le déficit public italien.

Ni les Italiens, ni les Européens ne peuvent se passer d’un État italien solvable pour maintenir un minimum de justice, de sécurité et de droit entre les Italiens.  Les biens et services produit par l'Italie font l’interface économique et politique entre le nord et le sud du continent, de la Méditerranée et du monde. Depuis au moins 2000 ans, la stabilité de l’Europe se détermine sur la stabilité de l’Italie. Or financièrement, la dette publique italienne est insoutenable par l’économie italienne sans l’engagement de l’épargne publique et privée des partenaires de l’Italie, c’est à dire sans un système de compensation fiscal, financier, économique et politique des flux de capitaux entre le marché intérieur italien et les marchés internationaux.

Une confédération de l'euro pour mutualiser les risques de l’État de droit

En d’autres termes, la prime de risque sur l’État italien est illiquide sans une véritable intégration de la fiscalité et des dépenses publiques italiennes dans le marché de la liquidité monétaire en euro. Les Italiens riches se sont toujours protégés des insuffisances réelles ou supposées de leur État en exportant leurs liquidités dans les banques non-italiennes afin d’échapper à la fiscalité et de manipuler leur puissance publique de l’extérieur. La politique italienne est substantiellement une clé de l’équilibre politique de toute l’Europe. Aucune dépense publique italienne n’est efficace en dehors d’une coordination publique européenne. Aucune dépense publique italienne n’est financée sans coopération fiscale étroite sur la domiciliation des actifs, la mesure des revenus et le recouvrement effectif des impôts et taxes.

La zone euro sans État fédéral met ouvertement les États nationaux en concurrence sauvage quant aux règlements des services publics nécessaires à l'existence d'un marché européen unifié. L’euro libéral est de ce fait explicitement en faillite en Italie. Concrètement, soit les banques italiennes, soit l’État italien vont s’effondrer par la mécanique en œuvre de l’euro libéral nominalement indépendant des politiques nationales et fédérale. La seule issue rationnelle à l’impasse actuelle est l’organisation d’un marché européen public réglementé des capitaux, de la fiscalité et des droits positifs des personnes physiques citoyennes de l’État confédéral de l’euro.

Un marché européen public central des CDS (credit default swap ou prime de crédit)

Pratiquement, il faut que le spread (prime de risque crédit) italien soit fiscalisé, comme tous les autres que l’emprunteur soit public ou privé. Cela signifie que les acheteurs du risque public en euro ne règlent leurs achats et ventes de titres que sur un marché central unique commun directement contrôlé par la BCE. La BCE enregistre alors les spreads effectifs dans sa comptabilité et paie un impôt à l’État confédéral de l’euro selon la politique de garantie des finances publiques européennes décidée et contrôlée par le budget de l’État confédéral. L’État confédéral est doté de pouvoirs exclusivement financiers : judiciaires, législatifs et exécutifs. L’euro est alors l’unité de compte du droit commun des Européens de l’euro, délibéré, voté et budgété par le Parlement de l’euro élu par les citoyens de la zone euro.

L’euro devient alors une véritable monnaie en ce qu’elle peut mesurer et régler le prix de tout ce qui compte en droit positif commun pour les citoyens, les peuples et les nations d’Europe confédérée. Le marché n’est plus une chambre secrète de la confrontation opaque des intérêts privés mais le lieu de la régulation économique par la loi commune publique délibérable de la production des biens et services bons et nécessaires pour tous. La masse monétaire en euro devient la prime d’assurance vendue par la Confédération de l’euro aux personnes physiques citoyennes qui se garantissent librement et solidairement le développement réciproque de leurs existences et biens communs.

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20 septembre 2018 4 20 /09 /septembre /2018 16:01

Ce texte a été publié par Paul Jorion le 18 octobre 2010 sous le titre L’appel de Zhou Xiaochuan, dix-huit mois plus tard.

Il y a dix-huit mois

Le 23 mars de l’année dernière, dans un texte intitulé : « Réformer le système monétaire international », Zhou Xiaochuan, le gouverneur de la Banque Populaire de Chine (PBC), la banque centrale chinoise, établissait un bilan précis et étayé de la crise mondiale dans sa dimension monétaire. Il expliquait que l’actuel système international, fondé sur l’utilisation d’une monnaie nationale, le dollar américain, est inédit dans l’histoire monétaire mondiale.

Jusqu’en 1971, le dollar a été admis par les accords de Bretton Woods comme unité de compte et de réserve internationale équivalente à un poids constant d’or à raison de 35 dollars pour une once. En aout 1971, le Président Nixon décidait unilatéralement de suspendre la convertibilité du dollar en or à un prix fixe. À partir de cette date, la monnaie a changé de nature, en rupture avec la conception multi-séculaire qui avait prévalu jusque là. La Réserve Fédérale des États-Unis ne garantit plus la conversion de ses crédits contre une quantité certaine de métal. Le dollar n’est plus alors que la représentation comptable d’un crédit auprès de la Fed, échangeable contre n’importe quel bien ou service réel mais à un prix flottant au gré du marché.

Dans sa déclaration, le Gouverneur de la Banque Centrale de Chine constate qu’une expérience multi-séculaire de la monnaie a enseigné la nécessité d’aligner la circulation de signes monétaires sur l’offre de biens et services disponibles à la vente. La monnaie doit être émise selon des règles qui ajustent la comptabilité des revenus de toute nature à l’équilibre de l’offre et de la demande. Sans entrer dans le détail du mécanisme de la création monétaire par le crédit, Zhou Xiaochuan pose que l’adossement de la monnaie au crédit n’est pas intelligible sans des règles explicites préalables. Si donc une banque centrale peut piloter l’émission monétaire par sa politique d’allocation de crédit, cette capacité n’existe pas hors de son périmètre de souveraineté. Sans nommer le dollar, Zhou Xiaochuan dénonce la contradiction dans laquelle se retrouve un banquier central qui prétend gérer avec un seul instrument deux équilibres différents, celui de son économie nationale et celui de l’économie mondiale.

Une monnaie sert à exprimer des prix d’équilibre instantané d’offre et de demande pour un bien. Elle sert également à comptabiliser à partir de ces mêmes prix les dettes qui résultent des délais de règlement accordés aux acheteurs par les vendeurs. Quand les prix internationaux sont fixés avec une monnaie nationale, la même banque centrale se retrouve responsable de la liquidité des prix internationaux, de la liquidité des prix domestiques et de la liquidité des crédits entre le marché domestique et le marché international. Elle accorde des crédits selon les besoins anticipés de transaction sur son marché domestique. Elle intègre les transactions des opérateurs domestiques  avec l’étranger. Mais elle ignore toutes les transactions des opérateurs étrangers réglées avec sa monnaie hors de son propre champ de régulation. Le banquier central d’une monnaie « de référence », c’est-à-dire utilisée hors de son marché domestique, n’a pas de vision fiable ni du besoin de liquidité des étrangers entre eux ni du crédit réel de son économie nationale face au reste du monde.

Zhou Xiaochuan dénonçait donc l’année dernière l’absurdité objective du système monétaire international en vigueur. Il conclut logiquement à la nécessité de dissocier l’unité de compte, de règlement et de dette internationale de toute unité de compte nationale. La banque centrale responsable de la liquidité internationale des prix et des dettes ne peut en aucun cas être une banque centrale nationale. La stabilité de la valeur de l’unité de compte internationale doit dépendre d’un système bancaire spécifique dont la gouvernance doit nécessairement être multinationale. Les institutions fondées par les accords de Bretton Woods, le FMI et la Banque Mondiale, répondent en fait à cette exigence et Zhou Xiaochuan note qu’elles ont été dotées à partir de 1969 d’une nouvelle unité monétaire, le Droit de Tirage Spécial (DTS), définie comme un panier de plusieurs monnaies. La valeur du DTS est la moyenne pondérée des taux de change des monnaies nationales qui la composent. Elle est déterminée par les politiques monétaires de plusieurs pays. Mais le FMI n’a aucun pouvoir d’émission autonome lui permettant de gérer la liquidité mondiale.

Zhou Xiaochuan voit dans le FMI les prémices d’une banque centrale mondiale capable de gérer la liquidité mondiale avec un objectif de stabilité globale des prix en DTS. Mais cela implique l’autonomie d’émission de crédits en DTS et une cotation minimale d’actifs en DTS pour fournir au FMI un référentiel de prix qui mesure la valeur du DTS. Le Gouverneur de la PBC réclame le retour au schéma proposé par Keynes d’une monnaie internationale distincte dans sa définition des monnaies nationales et il propose en conséquence une redéfinition du DTS par des actifs réels négociables en DTS. La définition rigide par un panier fixe de monnaies est abandonnée. Les contreparties de l’émission du DTS ne sont plus des droits fixes alloués aux États qui engagent leur monnaie dans la composition du DTS mais les réserves de change déposées en fonction de l’activité économique réelle. Zhou Xiaochuan pose donc la règle d’un jeu financier international gagnant-gagnant ajusté au poids et au rôle réels des économie nationales dans le monde.

Un an et demi après

Constatons qu’un an et demi après la prise de position du Gouverneur de la BPC, aucune analyse économique étayée et argumentée n’est venue contredire la demande chinoise. Bien au contraire, la politique de relance budgétaire et monétaire menée avec une certaine concertation au sein du G20 a fait long feu. La croissance s’est maintenue dans les pays émergents – dont la Chine – mais s’est éteinte dans les pays développés après un faible redémarrage. Les dysfonctionnements du crédit à l’origine de la crise des subprimes sont toujours à l’œuvre. La dette publique s’est substituée à la dette privée pour nourrir l’allocation du crédit. Les actifs sous-jacents aux titres subprimes ne sont plus des emprunts ou du capital privé mais des passifs d’État et de banque centrale. Les règles de liquidité du crédit restent opaques pour dissimuler qu’aucune richesse ne s’est créée entretemps en contrepartie de la monnaie créée. Le moteur monétaire de la croissance mondiale est l’endettement des États et il est plus difficile de définir et démontrer la solvabilité des emprunteurs en 2010 que ce n’était le cas en 2008. La Chine et les autres pays émergents ont accumulé des créances internationales en dollar, euro, yen et franc suisse, alors que l’incertitude accrue sur la valeur réelle de ces monnaies nationales.

L’instabilité des monnaies, latente au printemps 2009, est explicite à l’heure qu’il est. L’inondation de dollars ne peut plus être déclarée temporaire puisque la croissance ne redémarre pas aux Etats-Unis et que l’on se prépare à une nouvelle inondation. Les déposants internationaux en dollar cherchent à détenir leurs réserves de change dans d’autres monnaies. Ils poussent le dollar à la dévaluation et les monnaies-refuge à la réévaluation. Mais une réévaluation dégrade la compétitivité extérieure et menace la croissance domestique à proportion de l’intégration nationale dans les échanges mondiaux. Les banques centrales nationales, submergées par des afflux de capitaux en quête de protection, ont le choix entre laisser leur change se réévaluer, à l’instar de la Banque Centrale Européenne, et accroître leur émission monétaire, comme la Fed, et noyer leur économie domestique dans l’inflation et les bulles spéculatives sur les actifs domestiques. La liquidité mondiale est de moins en moins contrôlable. Les masses de capitaux circulantes génèrent des plus-values fictives et des capacités d’endettement hors de toute appréciation réaliste de la rentabilité. Des bulles de plus en plus grosses peuvent se créer n’importe où et provoquer la mise en faillite au choix d’un État ou d’une méga-banque.

L’économie réelle est à la recherche de repères fiables pour diriger et mesurer ses investissements. Le calcul économique est entaché d’une telle incertitude que les investisseurs réels limitent leur risque à des perspectives de rentabilité très élevées ou s’abritent sous la garantie publique. Ils accroissent la dette publique latente et la charge fiscale potentielle. Le recul des services publics et des protections sociales, le désendettement public, sont anticipé dans l’épargne de précaution. Le diagnostic esquissé par Zhou Xiaochuan est amplement confirmé par les faits. Les gouvernements et opérateurs financiers  connaissent ces faits, les intègrent dans leur anticipations et par là en amplifient les conséquences. Aucune logique collective de substitution ne se forme d’une rationalité monétaire internationale. L’instabilité monétaire engendre la volatilité des prix. Cette volatilité oblige l’économie réelle à mobiliser plus de capital pour ses investissements ou bien à acheter plus cher les instruments financiers de couverture du risque. Dans l’un et l’autre cas l’industrie financière accroît ou maintient sa captation de valeur sur l’économie réelle et se donne l’illusion de sa solidité et de sa rentabilité. Mais la richesse réelle se dérobe derrière l’apparente résistance des prix nominaux. L’épaisseur du plancher sur lequel gouvernements et banques occidentales spéculent et discutent n’a jamais été si mince.

Faut-il attendre une catastrophe pour que les propositions du Gouverneur de la PBC soient sérieusement étudiées ? La puissance militaire des États-Unis permettra peut être de continuer à imposer un prix forcé du dollar au monde entier mais ne parviendra pas à lui restaurer une valeur qu’il n’a pas. Aucune argumentation politique ou financière ne pourra forcer les banques à prêter au consommateur américain dont le déclin des revenus est irréversible. La croissance est morte dans tous les pays développés émetteurs de monnaie de réserve ou de monnaie refuge contre le dollar. La mutualisation des contreparties mesurées réellement à la masse monétaire internationale est  indispensable. L’exportateur de valeur réelle réduit ses investissements dans une production future s’il constate que les clients étrangers qui le financent le règlent avec une monnaie dont la valeur est intrinsèquement imprévisible. L’unité de compte des échanges commerciaux et financiers n’a plus de stabilité visible sans la concertation explicite intelligible des États nationaux.

La transformation du DTS en monnaie et du FMI en banque centrale mondiale serait bien l’un des moyens de créer le bancor. Mais il implique de lever l’hypothèque du veto de fait dont disposent les États-Unis dans son fonctionnement, conséquence de la logique censitaire de son mécanisme décisionnel, où le nombre de voix est proportionnel à la contribution à son financement. Ce serait là un des moyens de rationaliser la monnaie et la croissance dans une économie mondialisée. Le moyen d’affirmer aussi que les règles du crédit stable ne peuvent pas rester entre les mains des acteurs publics et financiers intéressés en eux-mêmes au crédit dont ils ont besoin.

Zhou Xiaochuan introduit sa démonstration de mars 2009 par l’affirmation capitale de la possibilité de monétiser le crédit pour autant qu’existent des règles explicites et transparentes de calibrage du crédit. Calibrage macro-économique à l’échelle du monde et micro-économique à l’échelle de chaque débiteur. Il pose implicitement que les règles du crédit monétisable doivent pouvoir être soustraites aux juridictions nationales soumises à leurs propres besoins de financement par le crédit. Pour que des dettes soient monétisables, il ne faut pas que l’emprunteur puisse d’une quelconque manière modifier les règles qui mesurent sa propre dette. C’est probablement le verrou logique qui bloque les gouvernements occidentaux dans l’adoption d’une réforme monétaire internationale. Ils espèrent préserver leur solvabilité au moins nominale en gardant la maîtrise des lois qui définissent la nature de leurs engagements. Adhérer à un étalon monétaire international consiste en réalité à tomber d’accord sur des critères fondamentaux universels de solvabilité. Un étalon monétaire international est un étalon de régulation universelle de la stabilité du prix et du crédit.

Pour être étalon de stabilité financière et monétaire, le DTS peut et doit se définir par des actifs réels. Ces actifs réels doivent pouvoir varier en volume et en prix dans la composition du DTS. Un poids invariable des monnaies nationales dans la définition de l’unité de compte international présuppose une contribution figée des économies nationales dans la croissance mondiale. Cette hypothèse est visiblement contredite par l’évolution actuelle des échanges internationaux. De même, une identification figée des actifs entrant dans la valeur d’une monnaie mondiale présuppose une explication immuable des origines de la croissance. L’enjeu d’un étalon monétaire international est le renouvellement permanent des hypothèses d’anticipation des prix et des volumes de la production future. La valeur propre d’une unité de compte internationale est d’engager une mesure du prix de n’importe quelle cause de valeur dans la durée. Cela impose un marché organisé transparent à l’intérieur duquel toutes les anticipations sont possibles à la condition que leur réalisation soit lisible et vérifiable à une échéance engagée.

Le marché spécifiquement international sans privilège de nationalité ni de droit fournit l’équilibre en DTS comptant et à terme de l’offre et de la demande des biens qui s’y négocient. La responsabilité du banquier central de la liquidité mondiale est d’anticiper les prix et les volumes négociés sur le marché en DTS. Si par rapport à son objectif de composition cible de l’étalon monétaire, il achète à terme les actifs qu’il juge correctement évalués ou sous-évalués et vend les actifs sur-évalués, il offre au marché une hypothèse de stabilité qui fait référence commune. La production effective de signes monétaires est alors directement indexée sur la vérification par le marché de l’hypothèse centrale de stabilité monétaire. Le marché génère de la liquidité par lui-même sur la valeur effectivement échangée. Le banquier central produit cette même liquidité par le règlement de ses achats à terme et la restitution au marché des plus-values sur effectivement réalisées sur les anticipations en volume et en prix. Le banquier central absorbe de la liquidité par ses ventes à terme et par la livraison effective des actifs achetés à terme.

Par un marché organisé à cette fin, l’émission de la liquidité internationale est effectivement alignée sur la production réelle de valeur négociée hors des systèmes monétaires nationaux. La solvabilité publique des États nationaux est l’un des actifs négociables sur le marché en DTS comme contrepartie de la liquidité mondiale. Il en résulte la possibilité de caler les parités de change nationales à la fois sur le prix international des dettes publiques et privées et le prix des biens et services échangés dans les flux commerciaux. Offrir par le DTS un outil de garantie des dettes publiques internationales est un argument d’adoption d’un système monétaire régulé que les États-Unis et l’Europe ne peuvent pas récuser devant leurs opinions publiques. Le programme des prochains G20 est là : poser les conditions de réalisation d’un étalonnage mondialisé de la valeur économique qui réponde à la demande chinoise.

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7 septembre 2018 5 07 /09 /septembre /2018 08:34

La crise mondiale du crédit dont la prime ne peut plus être réellement positive : dixième année

Ce texte a été publié par Paul Jorion le 26 septembre 2015.

Partons des faits. Le 17 septembre 2008, la banque étatsunienne Lehman Brothers est déclarée en faillite. La Réserve Fédérale des États-Unis s’est refusée à prêter de la liquidité centrale à un repreneur éventuel qui aurait garanti le remboursement des dettes de la banque d’affaire. Les paiements quotidiens sur les engagements de Lehman sont donc suspendus à partir du 18 septembre 2008. Des milliers de banques dans le monde ayant prêté directement ou indirectement se précipitent dans leurs livres comptables pour évaluer les créances qu’elles ont sur Lehman en risque de ne jamais être remboursées.

En quelques heures, la panique financière envahit le monde. La réalité saute aux yeux qu’on s’était convaincu d’ignorer : dans le régime de libre circulation du capital financier, il n’existe aucun mécanisme ni aucune règle qui permette de calculer précisément qui doit quoi à qui. Une grande banque internationale a fait faillite et aucun banquier, même pas la moindre banque centrale, n’est capable de garantir qu’il dispose de suffisamment de capital pour couvrir la perte possiblement encourue. La faillite de Lehman est un cataclysme mental et cognitif pour toutes les banques et assurances qui sont branchées sur le marché mondial de la liquidité monétaire en dollar.

Dans la confusion générale, les banques se mettent immédiatement à solliciter les opérateurs financiers qui leur ont vendu des assurances sur leurs crédits potentiellement impayés par Lehman. Très vite, la menace systémique se profile de la concentration des risques sur quelques opérateurs spécialisés dans l’assurance du crédit, dont l’assureur AIG qui essuiera officiellement 100 milliards de perte au 31 décembre 2008. En dépit de leur finalité originelle de répartition et de division du risque, tous les appels en garantie convergent sur les mêmes acteurs. Les réserves financières constituées pour couvrir les risques de crédit du système bancaire mondial se révèlent brusquement radicalement insuffisantes. La Réserve Fédérale des États-Unis se trouve instantanément obligée d’accorder des milliers de milliards de crédits relais pour empêcher la suspension de tous les paiements interbancaires entre des institutions qualifiées ultérieurement de « systémiques » qui ne savent plus réellement si elles sont objectivement et véritablement liquides.

La Loi mise en faillite par la finance

En réalité, les lois nationales et les réglementations internationales interdisent aux banques centrales de consentir des crédits illimités aux banques privées. Les banquiers centraux ont donc dû dans l’urgence et la précipitation, téléphoner aux ministres du budget pour ne pas être déférés devant les tribunaux quand viendrait le moment de mesurer les responsabilités. L’acquiescement général du pouvoir politique à la suspension de tout régime de légalité dans le monde financier a été immédiat quand il est apparu que les déposants de l’économie réelle pouvaient perdre instantanément tout ou partie du prix de leurs dépôts et de leur épargne déposée dans les banques.

La faillite de Lehman n’a donc pas mis fin au régime du capitalisme libéral par le fait para-normal que les grands États ont foulé aux pieds la légalité qui définit juridiquement le capital comme couverture du crédit. Contre la souveraineté, contre leur constitution, contre le principe de la propriété et de la responsabilité, les États dits de droit se sont portés garants collectivement et sans limite du système bancaire mondial piloté par la Réserve Fédérale des États-Unis. D’institution centrale du système de crédit international, la banque centrale des États-Unis est passée au statut transcendant de deus ex machina de la liquidité bancaire internationale. Toutes les banques centrales du monde sont devenues de fait par des autorisations de découvert à la Réserve Fédérale, des filiales du gouvernement mondial de la monnaie au dessus des lois civiles. La banque centrale du dollar est devenue de fait le prêteur universel en dernier recours de toute économie mondiale.

Derrière l’escroquerie cognitive des subprimes qui a servi de catalyseur, et derrière ce qui nous est aujourd’hui gentiment présenté comme l’effacement inéluctable et nécessaire du pouvoir politique en économie, il faut mesurer l’ampleur de la révolution qui s’est accomplie. Depuis la faillite de Lehman, le crédit des banques centrales aux banques privées n’est plus régi par la loi des personnes et de la souverainetés des nations constituées en États. Le crédit central qui fait exister la monnaie par quoi sont réglés les échanges entre les hommes est une pure technique qu’aucun législateur, aucun pouvoir politique, aucun juge ne peut discuter ni modifier. Ce que les hommes produisent et achètent concrètement n’est plus le critère de calibrage de l’émission monétaire. La finalité première du capital comptabilisé en monnaie n’est plus de financer les activités qui répondent à des besoins humains délibérables.

Escroquerie à l’assurance par les dérivés de crédit

Une fois que le système bancaire mondial en dollar à obtenu la garantie sans limite de tous les États pour que les déposants et créanciers des banques ne subissent aucune perte comptable, un calcul approximatif des pertes assurées par les « dérivés de crédit » a pu se faire dans les mois qui ont suivi la faillite de Lehman. Les dérivés de crédit sont des assurances que les banques se vendent et s’achètent sur les pertes comptables qu’elles peuvent subir du fait de crédits non remboursables pour une quelconque raison. Des milliers de milliards de pertes comptables pouvaient être envisagées par les banques du fait de la mise en faillite de Lehman. Mais par les contrats d’assurance du crédit, les pertes réelles pouvaient être moindre, à la condition que les banques en position d’assurance disposent de suffisamment de réserves en capital pour verser tous les dédommagements dus et réclamés.

Le doute général sur la fiabilité du système financier ne pouvait être levé que si le total des pertes réelles sur les crédits effectivement non remboursables restait inférieur au total des fonds propres disponibles dans l’ensemble des banques. Le calcul des pertes effectives engendrées par les faillites bancaires précédant et succédant à celle de Lehman s’est révélé long, complexe et irrémédiablement approximatif. Pourquoi ? Parce que la monnaie et le crédit déconnectés d’une loi commune entre tout ceux qui achètent, vendent, doivent et paient, n’ont aucun fondement objectif quant à ce qui a de la valeur ou n’en a pas. Quand les banques ont confronté entre elles l’évaluation du solde de leurs créances réciproques après la banqueroute des subprimes, elles n’ont pu que constater la non concordance de leurs évaluations de ce qui était réellement perdu ou pas perdu.

En l’absence de critère objectif commun à un même marché, les dettes remboursables des uns sont des dettes non-remboursables pour les autres ; des dettes bien assurées pour les uns ne sont pas réellement assurées pour les autres. L’effondrement de la confiance sur le marché interbancaire du crédit n’a pu être évité que par l’engagement des banques centrales à faire crédit sans limite aux banques qui n’avaient pas été officiellement mises en faillite. « Sans limite » a explicitement signifié à tout esprit financier libéral : hors des limites d’une légalité commune, délibérée et partagée. Tous les banquiers ont alors consciemment réalisé que la détention d’une masse critique de dépôts des entreprises et des particuliers représentait un droit de tirage quantitativement illimité sur la liquidité des banques centrales.

En même temps que les pertes de crédit et que la solvabilité effective des assureurs du crédit ont été laborieusement évaluées pendant l’année 2009, les modèles de prix financier des dérivés de crédit ont été recalibrés afin d’intégrer l’élément systémique nouveau de la garantie étatique illimitée des dépôts bancaires. Miraculeusement, les banquiers sont alors parvenus à démontrer que l’ensemble des fonds propres des banques étaient suffisants pour faire face aux conséquences d’un nouveau krach type Lehman. Qu’avaient réalisé les banquiers au plan technique ? Que la détention des dépôts et de l’épargne des personnes physiques qui élisent les gouvernements, représentait un capital gratuit sans limite légale. Ainsi avaient-ils le moyen d’assurer n’importe quelle politique de spéculation sur la mesure du prix du crédit. La technique financière avait réalisé la dissociation absolue du droit et du bien commun.

Anéantissement financier de l’intérêt général

Depuis le krach des subprimes, il est devenu tout à fait inutile de produire de savants calculs juridiques et mathématiques pour « saucissonner le risque » de manière à le rendre invisible aux épargnants. Quand un banquier « too big to fail » a réalisé trop de pertes sur des opérations d’assurance du risque de crédit sur le faux marché mondial de la liquidité en dollar et en monnaies dérivées du dollar, il lui suffit de montrer ses dépôts pour menacer les pouvoirs publics de sa propre faillite. Autrement dit, il suffit de fabriquer des bombes logiques avec la théorie mathématique des jeux et des options ; puis de vendre ces bombes logiques contre monnaie à des « investisseurs » ; et enfin de présenter la facture aux États quant la bulle spéculative se désintègre. Pour être bien sûr de se faire comprendre par les politiques, on finance leurs campagnes électorales et on provoque des fuites de capitaux chez ceux qui hésitent à puiser dans les finances publiques.

Depuis 2010, les pouvoirs politiques ont cessé de parler du renforcement des règles prudentielles de couverture du crédit par le capital et de la surveillance publique des banques. Officiellement, les nouvelles règles et nouveaux dispositifs mis en place sont incontournables. Officiellement, aucun opérateur financier ne peut plus échapper au contrôle de la loi commune ni à la pénalisation de ses erreurs d’interprétation. Insensiblement, la spéculation bancaire libre sur l’indéfinition du crédit est devenue la crise du surendettement des États. Les banques centrales n’ont jamais pu revenir au régime légal de limitation centrale de la masse des crédits accordée à la liquidité interbancaire.

Les autorisations de découvert des banques auprès du banquier central sont bien revenues dans des limites d’utilisation plus décentes par rapport à la production réelle de richesse. Mais les conditions de couverture des crédits centraux par des actifs réels déposés dans les banques ont dû être assouplies davantage qu’au lendemain de la faillite de Lehman. Et surtout, les primes de crédit payées par les banques aux banques centrales sont devenues quasi nulles. En 2015, sept ans après la faillite de Lehman, les banques centrales prêtent gratuitement aux banques. De toute évidence, il est manifestement impossible de rehausser le prix qualitatif et quantitatif de la liquidité achetée aux banques centrales sans provoquer une cascade non mesurable de faillites financières.

Non seulement la matière première de la comptabilité bancaire ne coûte plus rien, mais cette liquidité n’est plus engagée dans l’économie réelle du risque d’entreprise. Toutes les pertes de l’économie réelle sur les investissements insuffisamment rentables sont prises en charge par le patrimoine et le travail des entrepreneurs réels et par la puissance publique hors des marchés financiers officiels. Entre les banquiers et les États, les pertes réelles de crédit restent non mesurables en capital financier effectivement constitué et disponible dans les banques. De fait, les bénéfices affichés par la finance ne sont plus constitués que du contre-prix des pertes mesurées dans les entreprises publiques et privées de l’économie réelle. A partir de son extra-territorialité, la finance retourne les lois politiques de souveraineté nécessaires à l’économie réelle, pour se faire rémunérer le service de la calculabilité économique qu’elle ne rend plus du tout.

Sophisme intéressé de la neutralité monétaire

Dans l’univers de la financiarisation totalitaire libérale, les flux monétaires de règlement des transactions réelles sont grevés d’un prélèvement libre sans contrepartie réelle. La masse des intérêts réglés sur les emprunts aux non-résidents des zones monétaires territorialisées, ne correspond à aucun service ni public, ni privé. Les intérêts versés par l’économie réelle sur ses besoins de financement ont pour seul contrepartie le risque systémique engendré ex nihilo par le postulat libéral de la monnaie exonérée de la Loi. Le système financier post Lehman réalise absolument le postulat libéral de la neutralité économique morale intrinsèque de la monnaie. Le sophisme de la neutralité monétaire repose sur un postulat juridique arbitraire du capital réel infini des banques centrales.

Le capital réel infini des banques centrales consiste à déclarer leur infaillibilité par une dispense de comptabilisation des pertes de crédit sur les banques privées. L’infaillibilité des banques centrales fait l’infaillibilité des banques en général puisque la banque centrale n’a pas à rendre de comptes sur la qualité de ses crédits. L’infaillibilité des banques centrales étant crée par la Loi, les gouvernements libéraux des États les plus puissants achètent par là un droit de prélèvement infini sur l’épargne mondiale réelle sans avoir à rendre compte du service de l’intérêt général à un bien commun universel. Quand le prélèvement financier oligarchique devient trop visible à partir du krach des subprimes, les « marchés » accusent les citoyens de trop dépenser et d’oublier de payer les impôts qui remboursent les dettes publiques. L’infaillibilité des banques fait la toute puissance des oligarchies.

L’anéantissement de la Grèce dans la zone euro est ainsi absolument nécessaire parce que la BCE ne peut pas comptabiliser la moindre perte sur les banques installées en Grèce ; et parce que les banques ne veulent pas compromettre, dans leur mauvaise appréciation de la solvabilité des États, les intérêts perçus sur les titres de dette publique. La déréglementation financière des années quatre-vingt actuellement en vigueur, a été construite sur la fiction du risque nul des titres publics. Les banques peuvent réallouer sans limite l’épargne de l’économie réelle au rachat des titres publics et peuvent reverser immédiatement et intégralement, la marge d’intérêt qu’elles perçoivent à leurs dirigeants et leurs actionnaires. Les politiques sont incités à endetter leur pays sans limite afin de financer leur story telling électoral qui n’a plus de rapport avec la réalité des citoyens contribuables.

Les portefeuilles de crédits des banques centrales aux banques privées sont devenus gigantesques. Les anciennes règles de proportionnalité quantitative du crédit central aux besoins de paiement quotidiens de l’économie réelle tombent dans l’oubli. La monnaie est désormais émise principalement pour que les banques puissent compenser la fraction de la dette interbancaire qui reste inscrite comme active mais ne pourra jamais être remboursée. Les banques ont vendu à leurs filiales logées dans les paradis fiscaux, tous leurs crédits qui ne leur rapportent plus rien. Les paradis fiscaux sont des trous noirs comptables qu’aucune autorité publique souveraine n’a le pouvoir de regarder. Les banques y sont totalement maîtres des principes de réalité et de légalité qu’elles appliquent aux crédits qu’elles y enregistrent : l’existence d’emprunteurs réels produisant des richesses effectives y est légalement invérifiable.

Utilité du paradis dans la religion féroce

Les paradis fiscaux créés aux XIXème siècle sont le socle du capitalisme financier libéral. Pour concentrer la richesse et les bénéfices de l’esprit d’entreprise aux dépens du travail réel, il faut soustraire à la Justice et au contrôle des citoyens les activités contraires à l’équité et à l’égalité des droits. Au moment du « scandale de Panama » en 1888, Panama était déjà un paradis fiscal parmi tant d’autres. Outre l’évitement de l’impôt, la paradis fiscal est une machine à produire des histoires publiques invérifiables : pas d’identification physique des contreparties engagées, pas de formalisation contractuelle objective, pas d’arbitre public impartial. La mutation qui s’opère effectivement par le krach des subprimes est la levée pour les banques et leurs dirigeants des derniers obstacles institutionnels à l’utilisation des paradis fiscaux.

A l’opposé exacte de ce qu’ils affirment, les gouvernements légaux recourent eux-mêmes aux paradis fiscaux pour ne pas inscrire dans les budgets nationaux présentés aux parlements les dépenses et les défiscalisations financières, dépenses fiscales destinées à solvabiliser le régime de l’anarchie financière absolue. Le symptôme financier de l’insolvabilité du système bancaire et monétaire est la croissance inexorable des dettes publiques officielles et officieuses comptabilisées ou non dans les comptes des États. Malgré les politiques d’austérité consistant à tailler dans les dépenses publiques de justice, d’investissement et de solidarité, et à alourdir la fiscalité, les déficits publics ne se résorbent nulle part. Les États sont contraints de prendre à leur charge par des ressources empruntées le financement de l’économie réelle abandonné par les banques.

Les paradis fiscaux qui masquent les pertes des banques masquent également les bénéfices des activités rentables. Les États payent des intérêts sur leurs emprunts sans pouvoir taxer toute la valeur ajoutée qu’ils ont pu préserver par leurs dépenses. Les dettes publiques s’alimentent d’elles-mêmes par les seuls versements d’intérêt, qui non seulement sont supérieurs à la croissance nette de la valeur ajoutée, mais qui ne sont pas taxables car versés à des faux non-résidents logés dans les paradis fiscaux.

La libre circulation du capital, la mondialisation de la finance hors des souverainetés politiques et la libre production bancaire de crédits hors des réalités objectivement mesurables, sont une machine infernale ontologique. L’économie réelle humaine est détruite par une insurmontable asymétrie d’information entre des oligarques politiques et financiers propriétaires d’une vision générale et des esclaves enfermés dans leur réalité particulière. Le vrai prix des choses entre ce qu’on sait coopérativement produire et la somme des besoins exprimés par les individus est réservé à une minorité d’initiés. La répartition des revenus rémunère la concentration du capital aux dépens du travail réel de transformation de la matière en biens effectifs. Le calcul économique falsifié par l’anarchie financière ne dit plus rien de ce que les hommes demandent ni de ce qu’ils offrent de produire par leur facultés de travail.

Épistémologie de l’escroquerie libérale

Devant l’évidence des destructions opérées par le non-système actuel de la prédation financière libre, la question se pose du mode cognitif par lequel les gens de pouvoir ont perdu à ce point le sens des responsabilités et de la mesure d’une réalité véritable. Si l’on pose que la destruction du monde par la cupidité ou la bêtise n’est pas une fatalité, il y a certainement une erreur cognitive dans le raisonnement libéral. La falsification libérale du réel consiste donc à tout hiérarchiser par les prix sans adosser la monnaie qui compte les prix à la Loi qui réunit les acheteurs et les vendeurs par des biens réels. La réalité libérale est juste quantifiée par des prix qui tombent de la loi surnaturelle de l’offre et de la demande. Les riches sont riches parce qu’ils offrent plus qu’ils ne demandent. Les pauvres payent des intérêts parce qu’ils ne sont pas capables de demander moins que ce qu’ils offrent.

L’intérêt cognitif de la crise des subprimes transformée en crise des dettes publiques est d’avoir mis à nu les dissimulations du paradigme libéral. L’outil financier qui contient cet impensé est justement le dérivé de crédit, dont la version à prix réel négatif s’appelle le « subprime ». Un dérivé de crédit est une prime d’assurance sur le bien fondé d’une décision de crédit. Il s’agit de mettre un prix sur la réalité subjective issue d’une décision qui peut objectivement ne pas atteindre son but dans le futur. Le prix garanti par le dérivé de crédit n’est versé par l’acheteur de la prime que si le remboursement du crédit ne se passe pas exactement comme prévu dans le contrat entre le prêteur et l’emprunteur. Si l’une des conditions du crédit qui détermine son remboursement, ne se passe pas comme prévu, le vendeur du dérivé de crédit se substitue à l’emprunteur défaillant. Une prime de crédit coûte moins cher que le crédit lui-même du fait que statistiquement, parce que tous les emprunteurs ne sont pas impotents, irresponsables ou voleurs, une fraction seulement des contrats de crédit effectifs débouchent sur un défaut total ou partiel.

La valeur primaire, donc le prix, d’un dérivé de crédit est fondé sur l’hypothèse d’un engagement des emprunteurs et prêteurs à respecter les lois civiles et les règles légales du crédit. Un dérivé de crédit est donc une assurance sur les résultats matériels de la subjectivité humaine, laquelle est plus ou moins intelligente, plus ou moins responsable et plus ou moins honnête. Le paradigme libéral pose que la réalité ne contient aucune distinction possible de la responsabilité subjective dans la définition de l’objet sous le prix qu’on lui donne. Un prix n’est pas discutable. Il découle mécaniquement de la définition de l’objet nommé sous le prix. Il est impossible de considérer qu’un acheteur et un vendeur voient un même objet sous leurs subjectivités distinctes. Il n’y a donc pas de rapport de force entre un acheteur et un vendeur, ni aucune nécessité de réguler ce rapport de force par une loi de nature morale qui soit plus qu’une loi physique.

L’économie libérale est intrinsèquement rentable parce qu’irréductiblement simple. Celui qui offre a raison parce qu’il a ; le vrai prix ne peut pas être autre chose que le prix de ce qu’il a. Celui qui demande a tort parce qu’il n’a pas l’objet du prix. Donc la loi de l’offre et de la demande est mécaniquement vérifiée par l’offre de prix de celui qui prétend posséder la chose. Il n’y a plus aucun désaccord raisonnable possible puisque celui qui demande n’a par définition rien de ce qu’il demande. L’économisme libéral élimine le problème de la valeur discutable du fait de la différence des subjectivités. Comme il n’y a plus de discussion, on comprend que l’équilibre de la dignité, des droits et des devoirs des acteurs réduits à la condition d’agents, ne fait plus partie de la problématisation du prix. L’économie n’a plus besoin de politique. Le calcul des prix n’est plus pollué par la finalité d’une demande humaine à satisfaire des besoins subjectifs.

L’être réduit à la matière de l’avoir

Le libéral n’a rien d’inhumain. Il ne voit juste pas du tout pourquoi le prix de ce qu’il a et de ce qu’il offre pourrait s’établir selon un point de vue différent du sien. Il en découle que celui qui demande et va régler son achat en monnaie n’a aucune raison de mettre son jugement personnel dans la balance du prix ; ni dans la balance du crédit que le système bancaire va mobiliser pour mesurer son pouvoir d’achat en offre future. Le postulat libéral de la primauté de l’offre implique la primauté du capital sur le travail. Le capital devient une réalité présente d’un ordre supérieur à la réalité future de ce que le travail produira. Celui qui offre de travailler pour compenser le prix de l’emprunt qu’il contracte, doit forcément être aux ordres du propriétaire immédiat du capital offert. Le capital n’est pas l’acquisition possible de biens futurs aussi réels que le prix actuel.

La vision libérale fait l’économie de la loi et de la définition contractualisée des biens qui déterminent la demande de travail. Le prix possible des biens n’est plus subordonné à la condition politique commune du bien. N’accorder de réalité qu’à l’offre de ce qui existe déjà, a pour avantage d’exclure du débat public, donc du processus de négociation des prix sur le marché, la question de ce qui doit exister et de la nature du travail qui est à l’origine de la production. La politique de la demande et de la rémunération du travail engagé dans la production ne sont plus négociables par le droit applicable à l’économie. Le propriétaire du capital se trouve de fait propriétaire de la définition des droits reconnus au travail. Il devient logique d’attribuer à l’entrepreneur le droit de racheter par la diminution de la rémunération du travail les coûts qu’il supporte sur les droits servis aux travailleurs.

L’explication par le coût excessif du travail de la décroissance post subprimes est irréfutable dans le paradigme libéral. La vraie valeur étant dans le prix de ce qu’on possède déjà et non dans le prix anticipé par le crédit de ce qu’on va produire par le travail, il faut forcément abaisser la rémunération du travail en droits et en salaires pour avoir une chance de revenir à une proportionnalité plus acceptable entre le prix du capital disponible et le prix de la production future. Aucun politique ou économiste libéral, ne peut imaginer que le rapport de prix de l’unité de capital à l’unité de travail puisse être ajusté par une politique monétaire délibérée du bien commun. Comme la monnaie libérale n’est qu’un instrument et non la mesure normative du capital par les droits du travail du citoyen, il est impossible de concevoir la proposition keynésienne de revalorisation du capital en crédit par la resolvabilisation de la demande en droits monétaires servis au travail.

L’incurie libérale s’écroule si la croissance de la dette est indexée par la valeur ajoutée objective du travail. Si la monnaie redevient l’expression de la souveraineté politique sur l’équilibre des échanges dans le temps entre les personnes, c’est à dire du travail par le capital, alors le crédit devient le prix actuel de la richesse véritable. Après avoir observé l’effondrement économique du paradigme libéral dans l’entre deux guerres, Keynes a implicitement défini l’instrument monétaire comme l’outil politique de proportionnalisation du prix du travail au prix de capitalisation en crédit bancaire de la production future. La monnaie est de nature politique parce qu’elle résulte du crédit issu de l’État de droit adopté par les sociétés politiques. L’État de droit keynésien n’est naturellement pas cantonné à l’intériorité des États souverains puisqu’il est international par la monétisation des échanges.

Substance monétaire de l’économie du vivre ensemble

L’outil d’internationalisation du droit entre des souverainetés différentes est la monnaie ; parce que la monnaie est une fonction de souveraineté, en l’occurrence celle de l’indexation des prix par la justice des contrats ; mais aussi parce que la monnaie est un instrument commun à tous les États par quoi les nations peuvent rationnellement négocier leurs rapports de prix en capital. La théorisation keynésienne de la monnaie revient à l’étymologie du capital : prix d’échange de la richesse globale d’une société humaine gouverné par une « tête » incarnant une communauté de normes partagées de transformation des biens. Le capital keynésien n’est donc pas dissociable ni de la tête qui le gouverne ni des têtes qui le travaillent. Le capital est donc le prix relatif d’une politique de production identifiable par une société incarnée.

Si deux sociétés sont en relation d’échange dans la durée, elles peuvent régler leurs échanges par le crédit qu’elles se font réciproquement. Le crédit intersocial est comptabilisé en prix unitaire du capital commun qu’elles constituent. Dans la chambre de compensation internationale que Keynes avait proposé à Bretton Woods, l’unité de compte des dettes internationales est de fait étalonnée sur le capital commun de tous les États engagés dans le commerce international. Un État en excédent commercial se retrouve créancier de la société des États en unité du capital nominal commun. Les créances ne sont pas garanties par chacun des États débiteurs mais bien par la communauté des nations propriétaires du capital international en « bancors ».

Si un État à la tête de sa propre zone monétaire vient à accumuler trop de créances sur ses partenaires par rapport au capital monétaire international qui le garantit, alors la prime de crédit de l’actif monétaire étatique créditeur est dépréciée par la réévaluation de la parité de change de la monnaie nationale en monnaie internationale. En contrepartie et afin de maîtriser la croissance de la masse monétaire internationale en proportion de la croissance mondiale réelle, les monnaies des zones excessivement déficitaires et excessivement endettées par rapport au capital international, sont dévaluées. La dévaluation d’une parité de change nationale revient à revaloriser la prime de crédit de la dette zonale en monnaie internationale. La compensation keynésienne est un système de garantie internationale du crédit.

La compensation en monnaie de capital étatique international a pour conséquence de distinguer le prix national et le prix international du capital. La contre-révolution libérale des subprimes serait renversée dans ses conséquences quant à la rémunération du travail. Le prix du travail à l’intérieur des zones monétaires n’est plus calculable directement dans les monnaies des autres zones monétaire. Pour négocier une compétence de travail d’une zone monétaire à l’autre, il faut passer par la parité internationale publique de la monnaie nationale, laquelle n’est calculable qu’à l’échelle de la souveraineté juridique donc en incluant le prix du droit et des services publics de la zone où le travail est effectué.

La monnaie keynésienne réintègre la finance du crédit dans les droits du travail en incluant le prix du droit effectif dans les parités de change. La rupture est systémique par rapport à la barbarie libérale : restaurée comme instrument financier de la responsabilité politique des États de droit, la monnaie contient la calculabilité du prix des primes d’assurance des droits du travailleur. Les États et les gouvernements ne sont plus obligés de servir exclusivement les intérêts financiers anonymes mais peuvent s’engager financièrement dans une politique de promotion du travail et de la productivité réelle du citoyen qui travaille. Si les droits et les investissements accordés au travail coûtent cher aux entreprises exposées au marché international, les surcoûts sociaux sont financés par la solidarité monétaire étatale induite par la dévaluation de la parité internationale concertée. Le financement de la croissance par une politique de la demande retrouve du sens.

Scientologie libérale du nominalisme quantitatif

Pourquoi les politiques et les entrepreneurs de bonne volonté n’ont-ils pas adopté et promu le système de la monnaie keynésienne ? La première raison est historique. La République fédérale des États-Unis victorieuse de la deuxième guerre mondiale est restée sur le plan économique dans l’état de guerre internationale qui l’a fondée en 1783. Elle a fermé les robinets de la liquidité internationale en dollar à tous les pays qui ont cherché à recouvrer leur souveraineté économique et financière. Elle a acheté la politique dans toutes les démocraties libérales où les « souverainistes » peuvent parler. Même après la chute de l’empire communiste, la guerre civile financière en dollar est demeurée impitoyable et mondiale. Le fisc étatsunien et ses alliés industriels branchés sur les réseaux d’espionnage numérique du gouvernement fédéral frappent où il veulent pour des bonnes raisons autant que pour des mauvaises.

Le coup de maître du libéralisme anglo-étatsunien a été la création de la zone euro sans création d’une gouvernementalité confédérale responsable devant les États nationaux et devant la société politique européenne. L’emprise des libéraux est absolue dans la zone euro ; les États nationaux ont perdu leurs moyens concrets d’action au profit d’une administration financiariste déterritorialisée constituée dans le marbre de traités supranationaux. Les partisans d’une vraie Europe politique fondée sur des gouvernements responsables, locaux, nationaux et fédéral, sont rendus inaudibles par la désertification conceptuelle de l’ordo-libéralisme franco-allemand. L’écrasement explicite de l’État de droit en Grèce laisse les opinions publiques sans voix ni conscience.

La deuxième raison à l’ingénuité monétaire est l’illusion cognitive scientifiquement fabriquée par le nominalisme quantitatif. La civilisation de la consommation libre maximale focalise toute la capacité de cognition humaine sur l’objet détaché du sujet qui produit. Seuls comptent les prix en monnaie neutre des achats qui font exister l’individu pour lui-même. Alors, la rationalité juridique et morale du prix par le travail de la personne préalable à une quelconque consommation ne peut pas être pensée. Le citoyen résumé par son pouvoir d’achat en monnaie n’a plus d’accès à la causalité de l’économie des biens dans la politique de l’intérêt général. L’hypnose libérale repose sur l’annulation du prix des socialités intermédiaires entre l’individu et l’État. Par le monopole du crédit légal accordé à un système bancaire hors la Loi, les solidarités sociales ne sont plus le substrat de la valeur ajoutée.

Le capital libéral réduit la réalité à des marges virtuelles issues de modèles de prix mathématisés. Pour abolir le temps de l’intelligible, les modèles ont été informatisés. Les sociétés intermédiaires durables et réelles est exactement ce que le libéralisme anéantit. Si les citoyens ne se réunissent plus par des personnalités morales librement constituables dans le temps, la transformation de la matière physique par les prix n’a plus de substance. La restauration par la monnaie des conditions de possibilité d’existence libre des sociétés intermédiaires est précisément le chemin d’invalidation du nihilisme libéral. Or il se trouve que tous les outils d’indexation de la monnaie par la multiplicité libre des sociétés intermédiaires sont déjà utilisés dans l’actuelle compensation planétaire des échanges.

Inverser le sens de la compensation financière internationale

Les outils cachés de la finance globalisée sont : la propriété personnelle des données informatisées de mesure du crédit ; le langage informatique hypertexte qui transforme la parole en nombre et réciproquement ; le marché des changes qui rend négociable les primes de change entre des discours politiques différents ; le marché interbancaire mondial qui produit des parités de change nominal variables selon un équilibre unique des rapports de force internationaux.

La monnaie de compensation multinationale proposée en 1944 par Keynes dans la négociation des accords de Bretton Woods existe matériellement et politiquement depuis le krach de 2008. Mais au lieu d’avoir été utilisée pour répartir les pertes de crédit sur les détenteurs de capital réel, la monnaie internationale de fait a servi à comptabiliser un accroissement fictif des dettes publiques ; afin de faire payer par les contribuables nationaux le capital virtuel amassé par les oligarchies financières « non-résidentes ». Le capital réel est la compétence de travail achetée par la demande sociale à l’offre sociale. Le crédit réel est l’anticipation politique comptable des revenus du travail par les sociétés qui en ont acheté les productions. Enfin la monnaie internationale est l’unité de compte implicite qui a réalisé l’égalité du prix de toutes les dettes au prix de toutes les créances à l’échelle de la société mondiale.

Pour sortir du virtualisme financier libéral, il faut et il suffit que la propriété personnelle des données du crédit soit publique et socialisée. C’est à dire : qu’il soit impossible de comptabiliser un crédit au nom d’une société dont la réalité n’est pas identifiable dans des personnes physiques nommées ; donc que toute société débitrice ou créditrice en monnaie soit mesurable par l’identité vérifiable de chaque personne physique qui en fasse partie ; donc que la fonction d’une banque soit de garantir l’indexation de tout actif par les personnes morales qui en assurent le prix, et par les personnes physiques qui en réalisent le prix ; donc que la fonction d’un État soit pour chaque société déposée par son capital en monnaie, de garantir la justice entre les citoyens actionnaires solidaires.

La subversion de la virtualité libérale par les sociétés réelles n’est rien d’autre que le régime politique de la démocratie libérale ; mais libérale parce qu’économiquement et financièrement juste. Dans le régime de la démocratie véritable, il n’existe pas de capital sans une société de citoyens coopérant à la réalisation du crédit sur un ensemble commun d’objets moraux. Et il n’existe pas de société financièrement solvable sans la caution d’une société de droits par qui les personnes physiques sont assurées de leur intégrité dans les activités des sociétés intermédiaires. La loi et le budget communs d’assurance mutuelle sont nécessairement le fait d’une société politique intermédiaire ; intermédiaire dans la société humaine une. L’économie de la liberté est la délibération socialisée des biens sous le prix négociable des choses concrètes.

Application pratique à l’Union de l’euro

Si les Européens veulent revenir sur le chemin de la démocratie par la monnaie unique dont ils se sont dotés, ils ne peuvent pas éviter de fonder une société politique, financière, intermédiaire, commune. Donc un État confédéral de leur monnaie commune. Il ne faut pas penser l’État confédéral de l’euro comme une réplique de la république fédérale impériale étatsunienne ou des métropoles impériales romaine, britannique, française et allemande. La Confédération de l’euro est une société politique de compensation financière entre des souverainetés nationales pleinement libres et responsables. Les règles économiques et financières de fonctionnement des nations et de la confédération sont de même nature, mais ordonnées séparément dans des personnes morales instituées et distinctes.

Si les contrats politiques internationaux sont inscrits dans la chambre de compensation de l’euro et si l’armée et la police restent dans les mains nationales, le pouvoir politique confédéral ne peut plus être capté par des intérêts nationaux ou étrangers. Évidemment, le prix de conversion de l’euro entre les souverainetés internes et dans les devises étrangères, doit devenir un monopole du marché monétaire public confédéral. Il devient impossible à un intérêt financier en dollar ou en livre sterling de prêter ou d’emprunter des euros sans être représenté par des personnes physiques citoyennes de la Confédération de l’euro. L’appartenance à la zone euro implique par conséquent une administration douanière confédérale capable de filtrer tous les flux de capitaux réels, donc des personnes et des biens, aux frontières du territoire de l’euro.

Pour que le contrôle confédéral des personnes et des biens soient l’application concrète de la loi commune, il faut que le gouvernement de la confédération soit incarné par des représentants législatifs et exécutifs élus par les citoyens de l’euro. Les juges indépendants y sont rémunérés par une taxation confédérale de la valeur ajoutée. Dans une compensation publique organisée par l’actuel Système Européen des Banques Centrales, il n’est aucun obstacle à l’enregistrement unique et exhaustif des personnes physiques. Chaque citoyen inscrit dans le SEBC, peut disposer d’une voix en euro pour désigner le président, les ministres, les députés et les juges confédéraux qui capitalisent objectivement son suffrage. Pour qu’un citoyen européen soit investi de l’une de ses fonctions, il faut et il suffit qu’il réunisse la majorité des suffrages sur son nom par rapport à tous les autres candidats reconnus éligibles par l’assemblée législative de la Confédération.

L’intégration du capital, du crédit et de la monnaie dans la démocratie réelle des biens personnalisés par les sociétés intermédiaires revient à organiser un marché central public des dérivés de crédit. La prime de crédit fondamentale est la personne. Elle est figurée activement par le corps physique et passivement par la socialité morale intermédiaire libre. Le prix réel de toute personne physique ou morale est par définition unitaire et égal au prix nominal. Le prix unitaire de toute personne est l’essence quantitative de la monnaie : sa condition d’existence dans la réalité. Le prix des choses se déduit alors du prix des personnes par décomposition analytique des biens dans la subjectivité des personnes. La décomposition financière analytique d’un objet de bien est le titre négociable d’un actif. Le prix d’un titre est le prix en crédit qui fait accord entre acheteurs et vendeurs effectifs solidaires par la même loi. Pour que le prix d’un actif financier soit la mesure d’un bien réel, il faut qu’il soit garanti par le capital d’une société intermédiaire.

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29 mai 2018 2 29 /05 /mai /2018 10:05

Le platonisme libéral fait semblant d'ignorer la distinction entre la personne et les idées qu'elle défend. Ainsi fait-on disparaître toute la souplesse ontologique que les relations entre personnes apportent à la mise en oeuvre des idées dans la réalité des sociétés politiques. La proposition de Savona d'instituer une monnaie de solidarité italienne à l'intérieur du nominalisme ordo-libéral de l'euro aurait détruit les droits d'usure du capital en euro sur le travail et l'existence des peuples et des personnes dans la zone euro. Le droit libéral s'applique dans sa littéralité abstraite afin que le bien commun des personnes, c'est à dire des citoyens, n'engendre de bénéfices que nominaux pour les seuls titulaires de droits privés de propriété ou de créance.

Un exemple de cette allergie extrême-centriste à la démocratie est le mot "populiste". Le concept lié à la notion de peuple se substitue à la réalité politiquement pensable du peuple afin de vider la délibération politique de toute capacité à transformer la réalité par la vérité d'une démocratie efficiente.

C'est la monstration totalitaire de l'absurde entre un modèle idéologique de lecture politique et une réalité économique qui n'a plus aucun rapport intelligible avec les discours qui prétendent la diriger. La démonstration du nihilisme ordolibéral est effectivement faite par une communication politique de la démocratie procédurale que le système monétaire déconnecte structurellement de toute réalité sociale, populaire et relationnelle concrète. La décorrélation est une nécessité cardinale de l'efficience des modèles financiers de "couverture" du risque dans le système mondialisé de la monnaie libérale neutre.

Techniquement, Mattarella constate qu'une politique de la République au service du peuple italien est radicalement incompatible avec le système monétaire multinational de gouvernance des échanges économiques par les prix et par les dettes en euro germanique. Comme il n'y a actuellement pas de politique italienne possible du peuple italien responsable de lui-même par la monnaie de son propre État de droit, Mattarella met la République italienne en veilleuse jusqu'à ce qu'elle retrouve par une monnaie italienne de la démocratie le pouvoir d'émission et de régulation monétaire sans quoi l'auto-gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple est impensable.

Le robinet du gaz reste grand ouvert dans la chambre à gaz hermétiquement fermée des peuples de l'Eurozone jusqu'à ce que les peuples meurent, se révoltent ou se construisent des chambres de décontamination isolées de la toxicité financière libérale.

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27 mars 2018 2 27 /03 /mars /2018 08:27

Mise en examen du Président Sarkozy, des soupçons qui déboucheront sur un non-lieu

Aucun chef d’État ou de gouvernement ne peut être élu dans notre monde libéral sans un soutien massif de ceux qui ont de l'argent. Aucune campagne électorale ne touche suffisamment d'électeurs sans d'énormes dépenses de communication pour rémunérer des intermédiaires clés dont beaucoup se vendent au plus offrant simplement pour assurer leurs activités économiques, ou leur train de vie. De fait et si tant est que la Loi l'exige expressément, il n'existe actuellement aucun dispositif technique financier efficient à recenser et mesurer tous les flux monétaires alloués directement ou indirectement à la promotion d'un candidat et de son programme.

Ne parlons pas de l'origine rétrospective de tous les fonds qui affluent dans les caisses d'un candidat élu. Un chef d’État ou de gouvernement effectivement élu détermine par ses décisions ou ses non-décisions une foultitude de gains ou de pertes économiques pour tous ceux dont les intérêts individuels et collectifs sont liés à des lois, des normes, des investissements ou des dépenses de fonctionnement public étatique. Ne parlons pas non plus des rapports entre les états publics et privés de toutes sortes dans la sphère internationale où le mode le plus économique de résolution des conflits est encore un versement en argent à ceux qui d'une manière ou d'une autre sont en position de force réelle ou apparente.

La dérive historique du rationalisme impersonnel

L'irresponsabilité personnelle oligarchique financière et monétaire est consubstantielle à l'organisation libérale du monde depuis les Lumières européennes et depuis la mondialisation financière instaurée par les empires coloniaux libéraux occidentaux au XIXème siècle. Le dernier chef d’État à avoir répondu légalement sur sa vie-même du bon emploi des ressources financières publiques dont il était légalement la caution et le garant est Louis XVI. A partir du XIXème siècle, tous les États "modernes" font disparaître la responsabilité monétaire personnelle du chef de l’État en séparant la fonction budgétaire et fiscale de l’État de sa fonction de garantie de la valeur publique de la monnaie nationale.

Techniquement, les banques dites centrales qui émettent la monnaie de souveraineté des États deviennent officiellement des sociétés anonymisées dont les actionnaires contractuels mais non légaux sont des grandes fortunes nationales ou étrangères. Le chef de l’État, roi, empereur, président ou premier ministre, n'est plus responsable par sa tête ni même par son patrimoine propre de la comptabilité bonne de la ressource publique conformément à la Loi égale pour tous et au bien commun de tous. Les intérêts et comptes privés du chef de l’État sont bien distingués des intérêts généraux et des comptes publics. Mais en contrepartie les patrimoines concrètement mis en garantie de la sûreté du crédit public ne sont plus identifiés ni saisissables ; le capital réel de la banque centrale émettrice de la liquidité monétaire commune légale de toutes les dettes interpersonnelles n'est plus concrètement mesuré.

Le paradigme libéral de la monnaie permet la transparence économique légale et le contrôle comptable mais il abolit la responsabilité personnelle concrète du bon emploi économique et moral de la ressource publique et privée. Ceux qui prennent effectivement les décisions ne risquent matériellement et physiquement rien de plus que le capital liquide inscrit sur le compte bancaire de l'institution qu'ils représentent. Si les décisions compromettent des vies ou entrainent des destructions matérielles, personne n'en porte le poids moral et légal au-delà du capital comptable effectivement disponible dans les comptes de la banque centrale ou des banques débitrices de la banque centrale.

A qui profite le crime ?

Merveilleux système libéral qui fait porter sur les sociétés humaines toutes entières les conséquences matérielles des erreurs de jugement de quelques potentats auto-investis par la rationalité dite économique. Merveilleux système qui donnent à quelques possédants habiles la propriété de fait exclusive de toutes les ressources naturelles offertes au genre humain. Merveilleux système qui rend insaisissable par l'intérêt général la richesse matérielle fortuitement concentrée dans quelques mains plus habiles que les autres. Merveilleux système qui n'établit aucun lien économique entre le pouvoir de faire dans la réalité matérielle et le jugement moral de toutes les personnes physiques normalement solidaires par l’État de droit et par l'égalité devant la Loi.

Dans l'économie libérale globale d'aujourd'hui, il n'y a qu'un seul moyen d'approcher la vérité financière des puissants et des sachants : le témoignage "personnel" des puissants et des sachants conscients ou inconscients qui sont rémunérés par des intérêts qui ne sont pas identifiables. Au-delà d'un certain niveau hiérarchique institutionnel dans le champ de l'internationalité et de la globalité financière, il est absolument impossible de prouver quoi que soit en matière de propriété ou d'emploi de fonds apparemment engagés dans une finalité publique. Indépendamment d'une vérité financière non connaissable, le Président Sarkozy ne peut être condamné qu'à proportion du nombre "d'amis" qui le trahiront au risque et péril d'être eux-mêmes trahis par d'autres "amis".

En toute objectivité, l'ancien Président de la République Française vit dans un monde peuplé "d'amis" qui lui veulent le plus grand bien. Dans son discours de Toulon le 25 septembre 2008, n'a-t'il pas fustigé la banque mafieuse qui agit systémiquement au-dessus des lois, des réglementations et du pouvoir judiciaire des États de droit ? Dix ans après le krach des subprimes, les paradis fiscaux n'existent légalement plus et les marchés financiers sont complètement réglementés et contrôlés par des "autorités indépendantes" impossibles à corrompre. Ceux qui doutent d'un monde désormais assaini sont nécessairement des complotistes. N'est-il pas important aujourd'hui de montrer aux humbles que le président pourfendeur de la corruption financière était lui-même corrompu et aux puissants qui auraient des velléités de repentance, que les preuves de leur corruption sont d'avance constituées par des auditeurs ou des journalistes "indépendants".

Le complot des hypocrites

En toute objectivité, qu'est-ce qui explique la prolifération actuelle des espions, des technologies numériques d'espionnage, des terroristes, des armées privées et des méga-amendes payées par des entreprises aux États-Unis et à l'Union Européenne ? A partir du moment où les reconnaissances de dette sont la matérialisation du pouvoir de celui qui prête sur celui qui doit ; et de celui qui détient l'argent sur celui qui est juridiquement responsable, ne faut-il pas pour garder le pouvoir, menacer de mort physique dans l'espace international ou d'emprisonnement dans l'espace national, toute personne détentrice du pouvoir réel de subordonner l'argent à l'intégrité des corps ; et la liberté des corps au respect de l'intérêt général ; et l'intérêt général à l'existence effective d'un bien commun universel objectif ?

Comment le juge et l'administrateur prouvent-ils leur obéissance à la Loi particulière qu'ils représentent s'ils ont des dettes ou sont rémunérés par les lois d'intérêts étrangers ? Comment le législateur est-il solidaire de la société qui l'investit de son intérêt commun s'il peut régler ses dettes autrement que par la monnaie de la société qui le mandate ? Comment un responsable exécutif défend-il les droits et intérêts de la société qui le finance s'il peut ordonner des paiements en espèces invisibles au juge et au législateur qui garantissent son lien à la souveraineté dont il est investi ? L'argent symboliquement matérialisé par des espèces ou des titres au porteur simule une valeur de fait indépendante de la loi des personnes physiques responsables les unes envers les autres.

L'unité de compte monétaire actuellement détachée de la société identifiable et circonscrite qui en établit la valeur légale spécifique n'est finalement contre-garantie par aucune valeur réelle humainement vérifiable. Si une souveraineté civile ou entrepreneuriale n'est pas matérialisée par une et une seule unité de compte dont le prix soit ajustable selon la valeur relative des actes domestiques par rapport à ceux d'autres sociétés et d'autres circonscriptions d'intérêts, alors les prix des dettes interpersonnelles en monnaie ne sont pas réels et justes mais arbitraires et autocratiques. La logique la plus élémentaire de réalité expérimentale vérifiable veut qu'un prix ne soit pas réel s'il n'est pas relié à une société identifiable et circonscrite de personnes physiques solidaires par une même loi commune, des biens et services qui sont comptablement et légalement promis en contrepartie.

Conditions matérielles d'une économie de la rationalité

Les conditions pour que des flux financiers signifient une valeur légale réelle et vraie entre les personnes et les sociétés incarnant des intérêts communs partagés, sont simples à formuler et à mettre en œuvre. Les prix ne doive pas avoir de crédibilité légale s'ils ne sont pas rattachables par des comptes bancaires à une et une seule souveraineté incarnée par des personnes physiques nommées et protégées par une nationalité délimitée. La monnaie de papier ou la monnaie scripturale numérique qui ne se rattache à aucun gouvernement civil n'a donc en vérité aucune valeur réelle. Les monnaies qui ne sont pas seulement échangeables et convertibles sur un marché public surveillé par le juge pénal sont fausses. L'unité monétaire sans lien unique avec une société incarnée par des personnes physiques identifiées dans l'État de droit particulier reconnu qui les assure dans leur existence morale et juridique, n'a donc en vérité aucune valeur légale.

Techniquement et financièrement, la vraie monnaie légale exige un état civil central de toutes les personnes physiques reconnues et garanties dans leur existence corporelle réelle. Un identifiant numérique propre unique doit faire le lien entre la personne physique réelle et toute obligation ou actif comptabilisé à son nom. L'identification financière numérique de toute personne physique entraîne une garantie d'existence effective économique, juridique et morale par une personne morale indéfiniment couverte par un État de droit personnalisé. L’État de droit produit la justice par des personnes physiques incarnant les pouvoirs judiciaire, législatif et exécutif qui ont ensemble le statut de personne morale. Un État personne morale est monétairement assuré par une banque centrale ayant pouvoir d'émission monétaire qui mesure la liquidité des dettes dans la réalité. La valeur comptable des dettes est garantie par la souveraineté qui vérifie la réalité des dettes par la légalité et la justice des contrats et transactions interpersonnels.

La contrevaleur d'une dette interpersonnelle ne peut être crédible que rattachée unitairement à la monnaie de la société garante du débiteur ; rattachée unitairement à la monnaie distincte de la société garante du créancier ; rattachée unitairement à la monnaie seconde de la société garante des droits communs au créancier et au débiteur ; et rattachée à la monnaie générale encore distincte qui rend liquide les droits individuels par les droits sociaux. Les quatre monnaies nécessairement engagées dans toute transaction doivent être convertibles les unes dans les autres dans un marché public du crédit où la solvabilité de toute personne morale ou physique est financièrement et légalement garantie par une prime de change. La prime de change est une prime de crédit général qui fonctionne juridiquement comme les actuels dérivés de crédit échangés entre les opérateurs financiers.

La chose par le prix dans le sujet engagé

L'incrimination d'un ancien président français est donc soit le coup de grâce porté par les nihilistes libéraux à l'existence positive possible d'un État de droit impartial au service de la justice réelle ; soit l'occasion de reconstruire une véritable économie de la valeur humanisable délibérée par une chaine ininterrompue de responsabilités personnelles individuelles et collectives entre la chose et le prix.

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7 mars 2018 3 07 /03 /mars /2018 20:16
La globalisation de l'usure

« Subprime » a un sens général et un sens historique particulier. Particulier dans les pratiques bancaires étasuniennes : le débiteur final, celui qui doit effectivement rembourser le crédit à terme sous-jacent au titre de dette, a une notation de crédit inférieure à la notation minimale exigée par la communauté bancaire pour obtenir un crédit au taux du marché. En termes financiers, la prime de crédit du débiteur final est négative si on lui prête au taux du marché. Le « subprime » est donc aux États-Unis la pratique financière consistant à accorder un prêt à un débiteur insolvable selon la norme du marché mais en dissimulant la prime de crédit négative dans un titre financier synthétique construit pour que le risque de crédit sur le débiteur final ne soit plus visible ni calculable.

Au sens général, « subprime » signifie que la prime de crédit du débiteur final est négative par rapport aux conditions actuelles du marché : si le débiteur final devait emprunter actuellement tout ce qu’il a déjà emprunté dans le passé et qui est en cours, il ne le pourrait pas sauf à ce que les prêteurs passent immédiatement une provision sur le montant de la perte probable dès l’origine du crédit accordé. Au sens général, tout « non performing loan » est un subprime. L’euro est objectivement en faillite spécialement en Italie parce que si la règle prudentielle bancaire était appliquée d’interdiction d’augmenter les encours de crédit sur les débiteurs insolvables selon les normes du marché, alors il faudrait que la BCE et les banques centrales nationales cesse leurs concours et mettent en faillite les États et les banques.

Le « krach des subprimes » en 2008 a été déclenché par une décision de la communauté bancaire étasunienne incluant la Réserve Fédérale de ne plus refinancer Lehman Brothers en crédit interbancaire. Lehman avait accumulé trop d’engagements subprimes dans son bilan. La faillite a été provoquée pour permettre aux créanciers les plus puissants de Lehman de se saisir des actifs réels et de laisser le gros des pertes à la myriade des créanciers étrangers et des déposants directs ou indirects. La mise en faillite des États et des banques est ce que réclament les ordolibéraux européens. Les opérateurs financiers globaux qui se sont hissés au-dessus des lois et des Etats de droit appuient les politiques de rigueur pour prendre le contrôle direct des ressources fiscales et des actifs réels des pays les plus endettés. Autrement dit, généraliser le traitement de prédation financière infligé à la Grèce.

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Pierre Sarton du Jonchay
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Le Blog de Paul Jorion

 

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