La crise économique actuelle a ses racines dans la civilisation. La compréhension des phénomènes en cours exige une redéfinition de la monnaie, du crédit, du risque, du marché et de la responsabilité publique. La discussion est ouverte.
Commentaire déposé sur la pompe à phynance au billet de Frédéric Lordon
L’échec du système de la capitalisation à garantir les retraites est sans appel dans la crise actuelle. Mais c’est le processus de la capitalisation qui est en faillite. Pas la finalité de la retraite ni la capitalisation qu’elle implique ni la répartition qu’elle suppose. Le capitalisme est en échec parce qu’il s’est affranchi de la Loi. Les États et les sociétés démocratiques ayant renoncé à délimiter les intérêts humains laissent les opérateurs financiers fixer eux-mêmes les prix des actifs financiers qui expriment ces intérêts. Le capitalisme financier est devenu un système auto-référencé. Il mesure lui-même la valeur qu’il prétend créer. Lui confier la capitalisation des retraites revient donc à lui remettre un chèque en blanc contre une promesse de valeur future de retraites financièrement indéfinies.
La duplicité d’un système de capitalisation de n’importe quel système de retraite fut-il exclusivement fondé sur la répartition est de ne produire aucun résultat concret en matière de retraite. Tant que la finance n’est pas régulée, c’est à dire totalement encadrée par des définitions et des obligations juridiques fondées sur la réalité et non abstraites par les mathématiques et le juridisme, la capitalisation est un trou noir non seulement pour les retraites mais pour toute production de valeur future. Le capitalisme ne peut être efficient dans la valorisation du futur que si les modalités de répartition de la richesse qu’il peut produire sont définies en dehors de lui-même.
La réforme des retraites en France est tragique car elle prend acte de la perte d’un futur impossible à arracher à la spéculation. Comme le prélèvement de la finance sur l’économie réelle n’est pas délimité par une loi de répartition, non seulement la croissance réelle est définitivement perdue mais elle sera sanctionnée par un âge de départ à la retraite qui va s’éloigner indéfiniment. La capitalisation primant sur la répartition, il faut désormais repousser indéfiniment l’âge de la retraite pour éviter la mise en faillite d’un système financier et monétaire qui n’a pas pour finalité de mesurer la satisfaction présente et future des besoins humains.